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UN BOURGEON QUI POUSSE DEPUIS 40 ANS


En 1981, les exploitations biologiques se fédéraient au sein d’une association nationale chargée de développer et de défendre leur vision d’une agriculture respectueuse de l’environnement. Bio Suisse était née, et avec elle un label devenu incontournable sur les rayons des commerces d’alimentation.

Oeufs, fruits et légumes, viande, produits laitiers, pâtes, vins, produits transformés… Tout ce qui pousse, se récolte et se travaille en Suisse est aujourd’hui disponible en version labellisée par Bio Suisse, identifiable par un logo désormais familier aux consommateurs: le fameux Bourgeon. Il y a quarante ans toutefois, remplir son panier à commissions en privilégiant des produits ménageant la terre et la nature était loin d’être aussi facile; on doit à la volonté de quelques producteurs pionniers d’avoir ainsi changé en profondeur le visage de l’agriculture suisse autant que les habitudes des consommateurs.

DES RACINES AU BOURGEON

Bien sûr, les paysans bios existaient déjà avant 1981. Beaucoup d’entre eux s’étaientorganisés en structures régionales ou sectorielles, afin d’améliorer leur accès au marché et de protéger leurs produits. Ces organismes – dont le FiBL, Biofarm, Demeter ou encore Progana – déposèrent ainsi dans les années 1970 une requête auprès de l’Office fédéral de la santé publique visant à se prémunir des abus en déclarant leur production «aliments biologiques». «Une commission de haut niveau avait examiné la demande et en vint à la conclusion que le terme «biologique» en rapport avec les aliments devait être interdit. Cela nous a tous effrayés», se souvient Werner Scheidegger, pionnier bernois du mouvement. Une secousse qui allait inciter les paysans bios à se constituer en un groupe plus formel et plus fort, et surtout à mettre au point des lignes directrices pour encadrer leur modèle de production. En 1980, un cahier des charges fut donc déposé auprès de la Confédération. Il déboucherait sur l’adoption de l’ordonnance sur l’agriculture biologique… dix-huit ans plus tard. Sur la lancée, un label fut déposé. C’est de la réflexion autour du logo, le fameux Bourgeon, qu’est née ce qui allait devenir Bio Suisse. «C’étaient des idéalistes très engagés en faveur d’une agriculture plus durable, analyse David Herrmann, responsable médias auprès de l’organisation. Bio Suisse a agi presque comme une ONG. Chaque ferme «convertissait » ainsi une cinquantaine de familles qui achetaient leur nourriture dans de petits magasins ou directement à la ferme.»

 

«Bio Suisse est devenue comparable à un syndicat, qui oeuvre pour assurer de bonnes conditions de travail à ses membres.» David Herrmann

LA GRANDE DISTRIBUTION SÉDUITE

En prenant une place formelle dans le paysage agricole suisse, ces pionniers allaient le faire évoluer et remettre en question ses pratiques traditionnelles, souvent sans autre guide que l’expérience de ses membres – au prix de tâtonnements et d’une capacité à innover qui est encore aujourd’hui une des forces des producteurs bios. Dès le début, la jeune association a aussi eu pour mission de soutenir la commercialisation de la production biologique. «En tant qu’ONG, elle garantit la production et la transformation d’aliments sains de manière durable ; en tant que société, elle vend des droits de marque à des partenaires de distribution et de transformation, résume David Herrmann. Les redevances perçues sont utilisées pour promouvoir et développer l’agriculture biologique en Suisse.» L’introduction d’une licence Bourgeon pour les transformateurs de produits, mais surtout l’entrée en lice des grands distributeurs, allaient évidemment marquer des jalons importants dans cette évolution. Coop lançait ainsi en 1993 sa propre marque «Naturaplan» – calée sur le cahier des charges du Bourgeon – et Migros suivait en 1995, avec ses propres normes. «L’élargissement de l’offre en produits bios doit beaucoup à ces deux géants, souligne Pascal Olivier, responsable de l’antenne romande de Bio Suisse. Et la disponibilité croissante du bio dans la grande distribution se poursuit chez les hard-discounters, qui affichent depuis quelque temps une forte hausse de ce
secteur.» Logiquement, la part de marché en augmentation du bio allait aussi inciter plus d’exploitations agricoles traditionnelles à franchir le pas. En 1996, pas moins de 1500 fermes se convertissaient ainsi au Bourgeon (lire l’encadré ci-contre). Elles étaient alors plus de 3600 à l’arborer, contre moins de 300 membres

UN SYNDICAT D’IDÉALISTES

Cette augmentation aide aussi l’organisation à asseoir son rôle de défense de ses membres, rappelle David Herrmann: «Aujourd’hui, près de 7500 agriculteurs travaillent selon le cahier des charges de Bio Suisse. Pour eux, le rôle de la distribution et de la transformation est devenu beaucoup plus important. Ainsi Bio Suisse est elle devenue de plus en plus comparable à un syndicat, qui veut garantir de bonnes
conditions de travail à ses membres.» En devenant un segment commercialement intéressant pour les acteurs les plus ortants de la filière alimentaire, le marché du bio s’est inévitablement complexifié. La question des marges prélevées par les distributeurs et les transformateurs reste d’ailleurs embarrassante pour Bio Suisse, puisqu’elle concerne ses principaux canaux de vente. Certains estiment d’ailleurs que cela pourrait être un facteur limitant pour atteindre l’objectif de 25% de part de marché visé par l’association en 2025.

MODÈLE À SUIVRE

Car Bio Suisse, devenu tout à la fois ONG, syndicat et société commerciale, n’a pas pour autant perdu son ADN idéaliste et visionnaire. En 2008, l’association adoptait une nouvelle déclaration de mission baptisée «Bioland Suisse», dont l’objectif est de rendre l’entier de l’agriculture suisse durable et respectueuse de l’environnement. Mais en se faisant plus fort, plus visible et en parvenant à améliorer sa place dans le paysage agricole (notamment par l’introduction des paiements directs aux exploitations labellisées, en 1993) et les rayons
des commerces, le modèle bio a inévitablement attiré de plus en plus de professionnels plus pragmatiques qu’idéalistes. Avec parfois des tensions entre ces deux pôles, «que l’on a d’ailleurs pu observer lors des votations du mois de juin 2021 (les initiatives sur les pesticides de synthèse et l’eau potable, ndlr), relève le directeur actuel de Bio Suisse Balz Strasser. Mais qui dit bio dit diversité, y compris d’opinions. Notre fédération a toujours connu des discussions concernant son orientation, et nous devons l’accepter.» Il n’empêche, en quarante ans d’existence, l’association de pionniers est devenue presque à son corps défendant un modèle à suivre pour tous ceux qui aspirent à des changements de fond dans notre rapport à la terre. «Pour de nombreuses personnes, Bio Suisse représente tous leurs espoirs et leurs aspirations à un monde meilleur, remarque David Herrmann. Mais les objectifs environnementaux ne peuvent être atteints seuls. Et on ne peut pas faire reposer l’évolution de tout le système alimentaire uniquement sur les agriculteurs. La société, les secteurs de la distribution, de la transformation et de la restauration doivent également faire leur part et prendre leurs responsabilités. Et l’État lui-même peut promouvoir cette transformation en définissant les exigences de durabilité.»

Blaise Guignard

REGINA FUHRER

MEMBRE DU COMITÉ DE BIO SUISSE DEPUIS 1994 ET PRÉSIDENTE DE L’ASSOCIATION DE 2001 À 2011

Comment les agriculteurs bios étaient-ils perçus à l’époque où vous exerciez votre mandat et comment pensez-vous l’être aujourd’hui?

Pendant longtemps, les agriculteurs biologiques ont été qualifiés d’exotiques. Aujourd’hui, heureusement, nous sommes considérés comme des agriculteurs à part entière.

À sa création, Bio Suisse se profilait comme une organisation engagée en faveur d’une agriculture durable. Elle se revendique désormais plus comme une organisation syndicale. Que vous inspire ce développement?

Afin de rester crédible auprès des consommateurs, Bio Suisse doit montrer que ses principes et ses idéaux sont centraux. La force du Bourgeon est que les standards de l’agriculture biologique sont définis dans le cadre de discussions démocratiques. Bio Suisse doit également représenter les intérêts de ses membres vis-à-vis du commerce et des transformateurs.

Les votations sur les pesticides ont fait apparaître des divisions entre producteurs bios, certains s’opposant aux initiatives soumises aux urnes pour des raisons commerciales. Y a-t-il un clivage entre agriculteurs labellisés?

Même sous l’égide du Bourgeon, il y a des agriculteurs qui veulent aller plus loin et d’autres qui préfèrent s’en tenir à la situation actuelle… Mais une chose est claire: l’agriculture biologique doit continuer à se développer et à adopter de nouvelles idées telles que l’agroforesterie ou l’agriculture régénérative, par exemple.