Dossier
Gros plan sur les pommes et les poires d’antan
Leurs noms éveillent des souvenirs d’enfance, leurs formes étonnent et leurs saveurs surprennent les papilles: héritières de siècles de culture fruitière, les anciennes variétés à pépins ont mille secrets à dévoiler. Tour d’horizon en images de quelques-unes de ces ambassadrices du passé.
CALVILLE BLANC D’HIVER
Étonnante pomme que celle-ci: ronde et côtelée – on l’appelle d’ailleurs parfois calville à côtes –, couverte d’une peau
jaune-vert, elle révèle une chair jaunâtre riche en sucre.
Sa particularité:
Cultivée depuis 1600 au moins, elle était considérée comme un fruit de luxe.
CLOCHE
Très répandue dans les vergers et les jardins il y a encore un siècle, cette variété décrite avant 1865 se reconnaît au premier coup d’oeil: sa silhouette allongée qui lui vaut son nom, sa peau marquée de rose, aucun doute, il s’agit d’une pomme cloche.
Sa particularité:
Elle est la reine de la conservation; non seulement elle reste fraîche et croquante si on la stocke au frais, mais c’est même après quelques mois de repos qu’elle dévoile tout son potentiel aromatique.
BELLE FILLE DE SALINS
Petite pomme résistante – on peut la cultiver même en altitude –, la belle fille de Salins est apparue dans le massif du Jura. Sa peau est couleur paille lavée de rouge. La chair, elle, est très blanche, ferme et juteuse.
Sa particularité:
Son goût! Sucrée et parfumée, sa chair marquée d’une légère amertume rappelle l’amaretto. Étonnant et délicieux.
REINE DES REINETTES
Dans le genre modeste, on a fait mieux: non seulement elle fi gure dans les rangs de la famille des reinettes, considérées autrefois comme particulièrement nobles, mais elle en est couronnée reine. Il faut dire qu’elle a de sérieux atouts: sous sa robe jaune et rouge, elle cache une chair ferme et juteuse, délicate et épicée.
Sa particularité:
Apparue en Angleterre au XIIIe siècle, elle a sans doute été rapportée en Suisse par des mercenaires au service de la Couronne française.
REINETTE ANANAS
Cette pomme miniature, toute ronde et couverte d’une peau qui va du vert au jaune doré à mesure qu’elle mûrit, doit son nom à son goût surprenant: à maturité, sa chair acidulée dévoile des notes rappelant ce fruit exotique.
Sa particularité:
Cette variété d’hiver originaire de Hollande est apparue relativement tard dans les vergers de Suisse, soit au XIXe siècle.
BELLE FLEUR JAUNE
Elle est amusante, avec son arrière-train effilé et délicatement côtelé. La belle fleur – ou belle fleur, c’est selon – jaune a été importée des États-Unis autour de 1750. Son arôme prononcé et très équilibré en fait une favorite des connaisseurs.
Sa particularité:
La chair de cette pomme à couteau n’est pas croquante, mais tendre. Pour la déguster, ne la croquez pas, mais coupez-la en fines lamelles.
COMTESSE DE PARIS
Au XIXe siècle, on la considérait comme la reine des poires d’hiver. Sous sa peau épaisse et rugueuse parsemée de taches de rouille, cette grande dame très distinguée cache une chair blanche douce et parfumée.
Sa particularité:
Elle se croque fraîche, mais se prête également à merveille à la cuisson, accompagnant notamment canard ou gibier.
CURÉ
Ce fruit à la silhouette élancée entre dans la catégorie des poires dites «de ménage». Bonne à tout faire, la poire curé, que l’on trouve dans tous les vergers depuis le milieu du XVIIIe siècle, s’accommode volontiers en dessert: cuite au vin rouge avec un peu de sucre et quelques épices, elle fera des étincelles.
Sa particularité:
Son nom provient du fait qu’elle a été découverte par le curé de Villiers-en-Brenne, dans l’Indre.
LIVRE
Elle est impressionnante, cette grande poire charnue! Son nom est d’ailleurs en deçà de sa stature, puisque le poids d’un seul fruit peut facilement dépasser la livre. Très ancienne – elle pourrait être un vestige de l’époque romaine –, elle était traditionnellement conservée dans le foin durant l’hiver.
Sa particularité:
Elle ne se consomme pas crue. Cuite longtemps à petit feu, sa chair se teinte d’une belle couleur rosée et délivre de savoureux arômes.
Clément Grandjean