DOSSIER
PLONGEZ DANS LES BOIS DU RISOUD
Entre épicéas centenaires, blocs de calcaire et taillis impénétrables, la plus grande forêt d’Europe
est une destination incontournable pour les amateurs d’atmosphères mystérieuses. D’autant plus que
ces bois bordant la vallée de Joux (VD) recèlent leur lot d’histoire et de légendes.
Un tressaillement dans les feuilles mortes, suivi d’un éclair brun-orangé, attire notre attention: c’est un écureuil qui bondit à notre approche sur le tronc d’un arbre, puis le gravit à toute allure. Immobiles, nous le regardons disparaître entre les branches et attendons quelques instants avant de poursuivre notre progression dans les bois.
ÉPICÉAS D’EXCEPTION
À mesure que nous nous enfonçons dans les profondeurs de la forêt, les feuillus deviennent plus rares, cédant toujours plus de terrain aux conifères. Ici, ce sont eux les stars. Ces épicéas dont les frondaisons se confondent avec le ciel, là-haut, au bout d’interminables troncs longilignes, sont réputés dans le monde entier pour la qualité de leur bois. Les plus exceptionnels – on parle d’un arbre sur 10 000 –, abattus à un âge qui peut atteindre 250 ans, serviront à la fabrication de tables de résonance pour des violons ou des guitares. Notre itinéraire du jour trace une longue boucle destinée à nous donner un aperçu de la diversité et de la surface hors du commun de cette forêt: avec leurs 2200 hectares, les bois du Risoud constituent le plus grand espace boisé d’un seul tenant d’Europe. Trente kilomètres de long sur huit de large. Autant dire qu’il y a de quoi se perdre dans cet océan de verdure, parcouru d’innombrables routes forestières, sentiers et pistes destinées aux VTT.
CACHE-CACHE AVEC LA FRONTIÈRE
À droite? Non, à gauche. Repliant notre carte, nous obliquons à flanc de coteau pour traverser les bois d’est en ouest. Un muret de pierres sèches à moitié caché par une épaisse couche de mousse d’un vert électrique marque ici la frontière avec la France toute proche, rappel muet de l’histoire mouvementée qui fut celle de ces lieux durant la Seconde Guerre mondiale. Un groupe composé aussi bien de Français que de Suisses s’était donné pour mission de faire passer à travers ces futaies réputées impénétrables et quasi impossibles à surveiller marchandises de contrebande, fugitifs et documents secrets. Le temps a passé et, si le Chalet Capt, ancien poste de douane, est toujours là, il accueille aujourd’hui les promeneurs en quête d’un lieu de pique nique. La pause ne dure pas: il nous reste du chemin à parcourir si l’on veut retrouver Le Brassus avant la tombée du jour. Le détour par la Roche Champion, d’où le regard porte à des kilomètres sur les forêts vallonnées des départements du Doubs et du Jura, s’impose malgré tout. Un embranchement, encore, et nos pas nous ramènent vers le goudron tandis que les arbres s’écartent, laissant passer un peu plus de lumière. C’est le moment de prendre congé du Risoud et de ses mystères.
Clément Grandjean
+ D’INFOS www.myvalleedejoux.ch