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Le Salon suisse des Goûts et Terroirs fête ses 20 ans

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Tous les chemins mènent à Slow Food: à la découverte du terroir suisse oublié

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20 ans, le bel âge du Salon suisse des goûts et terroirs


L’idée d’une manifestation offrant une vitrine aux produits locaux et artisanaux naît à la fin des années 1990.


Une génération plus tard, le succès aidant, le petit marché a gagné en ampleur et en crédibilité.

On venait de vivre coup sur coup la crise de la vache folle, celle du poulet à la dioxine, bientôt suivies par d’autres scandales liés à l’industrie agroalimentaire… La fin des années 90 coïncide avec une forte demande de produits régionaux et de traçabilité de la part des consommateurs; c’est dans ce contexte que l’idée du salon a commencé à germer», se souvient Beat Kunz, un de ses créateurs et son premier directeur.

Quand ce dernier s’est retrouvé à la tête du Centre de congrès polyvalent et flambant neuf de Bulle, il s’est attelé à diversifier ses activités dans le sens «du développement durable, du terroir, de l’eau et de l’énergie». Le premier Salon romand des Goûts et Terroirs voit ainsi le jour en juin 2000. Vingt ans plus tard, le modeste marché des débuts s’est mué en rendez-vous incontournable de l’automne et, renommé Salon suisse des Goûts et Terroirs, a assis sa légitimité et sa dimension nationale.

UNE MANIFESTATION ATTENDUE

Le tournant du millénaire voit apparaître presque simultanément Fribourg Terroir et plusieurs offices cantonaux ou régionaux de promotion des terroirs, la Semaine du goût et la labellisation des produits suisses – l’étivaz décrochant la première AOC en dehors des vins. C’est dans ce contexte que s’inscrit la manifestation gruérienne: «La volonté de rapprocher le consommateur du producteur, le souci de transparence sont au cœur de notre stratégie depuis le début», souligne Marie-Noëlle Pasquier, directrice du Salon depuis 2011. On pourrait même affirmer que les années nonante sont celles de «l’invention de la notion de terroir, de sa sacralisation, sa mythologie, note Alessandra Roversi, consultante en alimentation: une des raisons qui ont contribué à la naissance du salon bullois sous une bonne étoile».

Le salon de Bulle est devenu un lieu d’échange et de convivialité où l’on peut goûter et comparer de nombreux produits.

Une des clés de son succès tient aussi indéniablement à son réseau, «aux liens étroits tissés d’emblée avec les offices régionaux de promotion du terroir, les chambres d’agriculture, les associations des métiers de bouche réunis au sein de la fédération patronale et économique de Bulle», estime Beat Kunz. Parmi ces derniers, la filière de la boulangerie-pâtisserie rêvait depuis longtemps de faire venir en Suisse la Coupe d’Europe de boulangerie. Le lieu et le prétexte étaient tout trouvés pour ajouter au jeune salon un événement fort.

Autres ingrédients de cette vitalité, une belle gamme de produits viticoles, une touche d’originalité ou d’exotisme – des eaux-de-vie rares aux huiles d’olive, des concours différents à chaque édition. Mais aussi une hyperspécialisation assumée et pointue, le choix de n’inviter que des artisans, le refus de la grande distribution et des marques issues de l’industrie.

Questions à Marie-Noëlle Pasquier,

DIRECTRICE DU SALON SUISSE DES GOÛTSET TERROIRS DE BULLE

 

Le Salon a 20 ans et se porte comme un charme:

quelles sont les clés de ce succès?

Je crois que nous avons été précurseurs en nous donnant pour mission de défendre les produits de proximité, les savoir-faire régionaux, la traçabilité. Nous n’avons pas dévié de cette ligne, préférant la qualité à la quantité, pour nous démarquer des foires généralistes grâce à une sélection pointue et exigeante – chaque année, nous refusons des demandes d’exposants. Ce succès s’explique aussi par le soutien de nos partenaires des offices régionaux et cantonaux de promotion des terroirs.

 

Comment voyez-vous son avenir: croissance ou diversification?

Avec 45 000 visiteurs en cinq jours, nous sommes à peu près au maximum de notre capacité. Notre objectif n’a jamais été de nous agrandir démesurément ni de franchir les frontières. Nous avions tenté lors d’une précédente édition de séduire davantage le public professionnel des restaurateurs sans que ce soit vraiment concluant: d’autres manifestations le font déjà. Nous avons d’autres pistes de réflexion, liées notamment à l’éducation au goût et aux ateliers.

 

L’éducation au goût, une priorité?

Dès sa naissance, la manifestation bulloise a voulu miser sur cette thématique. Par exemple avec des ateliers pour apprendre à confectionner des cupcakes d’Halloween, une tarte aux pommes ou encore un moulage en chocolat. Destinée aux 6-12 ans et accessible sur réservation, l’école du goût a chaque année un grand succès, mais les organisateurs ont souhaité lui donner plus d’importance, l’élargir à d’autres publics et en faire un espace véritablement ludique et interactif. C’est ainsi qu’a été conçu l’Amuse-Bouche, ouvert en 2015: un parcours axé sur les cinq sens, offrant différentes activités sur quelque 150 m2, qui se renouvelle en partie à chaque édition. L’idée d’un espace intergénérationnel en libre accès a même dépassé nos attentes.

 

Quels sont les points forts de la prochaine édition?

Nos invités d’honneur seront Terroir Fribourg qui fête ses 20 ans, le Pays du Saint-Bernard et  sa marque de spécialités Grand-Entremont et la Vallée d’Aoste. Un autre espace sera consacré au chocolat et au café, avec une démonstration de fabrication de chocolat bean to bar (soit de la fève à la tablette), aux spécialités venues de Nova Friburgo, cette colonie brésilienne fondée par des immigrés suisses il y a deux cents ans et au travail des apprentis boulangers-pâtissiers-confiseurs. L’Arène gourmande promet aussi de belles surprises, avec notamment des démonstrations réalisées par Ben et Léo, les talentueux jeunes chefs fribourgeois, et des battles autour du vacherin fribourgeois AOP…

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LE PUBLIC RÉPOND PRÉSENT

En plus de son marché – 300 stands prévus en 2019 pour plusieurs milliers de produits –, le salon s’est aussi constitué autour de l’école du goût et son prolongement récent et intergénérationnel qu’est l’Amuse-Bouche (lire encadré). Depuis 2009, l’Arène gourmande accueille de nombreuses animations, démonstrations de grands chefs, présentations de recettes, tours de main et débats. Plus de 150 cuisiniers ont accepté l’invitation pour de formidables moments de partage et de convivialité…

Si la première édition voit défiler près de 20 000 personnes, les hasards de la météo et du calendrier se chargent de donner un coup de pouce à la manifestation. En 2006, au terme d’un printemps très chaud, trop chaud pour ses produits les plus fragiles, mais aussi pour éviter la collision avec d’autres événements régionaux, ses dates sont repoussées à l’automne. La fréquentation est boostée de 12 000 visiteurs d’un coup et poursuit dès lors année après année sur sa courbe ascensionnelle, jusqu’à s’établir à plus de 45 000 visiteurs l’an dernier.


à chaque édition, plusieurs animations d’éducation au goût sont mises sur piedà l’intention d’un public plus jeune. Ci-contre, l’arène gourmande est l’animation reine du salon.

ATTIRER LES JEUNES GÉNÉRATIONS

La notoriété du salon et des produits romands a franchi les frontières linguistiques pour gagner la Suisse alémanique (70% des visiteurs sont Romands, le reste vient d’outre-Sarine ou au-delà). Marie- Noëlle Pasquier souhaite dès lors se tourner davantage vers les jeunes générations grâce à une approche pédagogique, didactique et festive à la fois. «Quand les plus jeunes ont goûté et apprécié de bons produits, ils reviennent en consommateurs avertis, plus affûtés et curieux.»

Le salon bullois est désormais ce lieu d’échange et de convivialité où l’on peut goûter et comparer de nombreux produits. Il reflète aussi l’idée, selon Béat Kunz, que «bien se nourrir est décidément un enjeu fondamental de santé et de bien-être».

Autant d’arguments précieux dans un environnement de vive concurrence. On assiste depuis une décennie à une véritable surenchère: pas une semaine sans qu’un marché régional, une foire bio, un concours vineux ou un marché de chef voient le jour. Les institutions a priori les mieux armées, à commencer par Slow Food, s’y sont cassé les dents: après huit éditions à Zurich et trois à Berne, les Slow Food Market n’auront plus lieu. «Les manifestations autour du terroir sont devenues trop nombreuses pour un marché exigu, constate Alexandre Fricker, directeur de Slow Food Suisse: si l’on ajoute à cette concurrence les coûts induits par des infrastructures géantes et les exigences de rentabilité d’une société privée, on comprend que les deux dernières éditions aient été déficitaires.» Le salon gruérien tire ici encore admirablement son épingle du jeu, disposant de ses propres infra-structures à Espace Gruyère SA et géré par son association éponyme.

 

VÉRONIQUE ZBINDEN

 

+ D’INFOS

Bulle, Espace Gruyère, 20e édition Salon suisse des Goûts et Terroirs de Bulle du 30 octobre au 3 novembre. www.gouts-et-terroirs.ch

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